50 nuances de Grey sort pendant la Saint-Valentin aux Etats-Unis. Le roman à succès d'E.L. James met en scène les ébats d'un jeune milliardaire et d'une timide étudiante. Le film est un des plus attendus de l’année. Son adaptation au cinéma a été interdite aux mineurs de moins de 17 ans non accompagnés aux Etats-Unis. En France, le Centre national du cinéma recommande de réserver le visionnage du film aux plus de 12 ans.
Sur quels critères ? Se sont-ils assouplis ces dernières années, sous l'effet de la banalisation des images de sexe dans la vie quotidienne ?
Pour être diffusés en salle, les films doivent obtenir un visa d'exploitation du ministère de la culture. Ce visa est assorti d'une classification qui détermine les catégories d'âge auxquelles le film est destiné :
- tous publics
- moins de 12 ans
- moins de 16 ans
- moins de 18 ans
- classification X (le classement en film X ne permet pas la sortie de l'œuvre en salles, hors cinéma X – il n'en reste qu'un en France)
(Le dernier cinéma X en France est le Beverley, à Paris. Il a résisté à internet, il propose des films pornos des années 70, 80, 90. La consommation du porno se fait à 85% sur des sites gratuits, selon un institut commandé par Marc Dorcel, leader européen. Ce qui explique sa difficulté à survivre. A la mort du propriétaire, ce cinéma deviendra surement un petit théâtre.)
Sachant que la commission de classification peut modifier les catégories d’âge en fonction des années.
Entre 2010 et 2012, 2000 films ont été visionnés par la CNC, seulement 128 sont classés « interdit aux moins de 12 ans ». Ce sont les films les plus violents qui génèrent le plus de recettes ?
Comment est prise la décision ?
Tout d’abord, le film est vu par une sous-commission (composée d’enseignants, d’étudiants, de « mères de famille », etc.). S’il n’y a pas une unanimité (90% de « tous publics ») une autre commission tranche.
Quels sont les critères ?
Elle fait preuve d'une « vigilance particulière » en ce qui concerne la violence (physique ou psychologique), les comportements dangereux ou délinquants s'ils sont banalisés ou valorisés, l'atteinte à l'image de la femme, à la dignité humaine, les scènes sexuelles crues et l'exhibitionnisme. Sur la forme, elle examine la durée et la fréquence des scènes « critiques », leur charge émotionnelle, leur caractère traumatisant.
Mais si le réalisateur met en image de manière intelligente des sujets sensibles, avec un message, le film peut être « tous public » ou avoir seulement un avertissement.
Quel est l’impact économique d’une telle décision ?
Lorsqu'un film est assorti d'une interdiction pour certaines classes d'âges, son public et son nombre d'entrées en salle se réduisent mécaniquement. Les cinémas ont l'obligation d'afficher les interdictions, ce qui peut engendrer des surcoûts pour les salles, qui doivent contrôler l'accès du public. Ainsi, entre 2010 et 2012, aucun film ayant obtenu une interdiction aux mineurs de moins de 16 ans n'a dépassé 100 000 entrées, à l'exception du film américain Le Dernier Exorcisme.
A la télévision, certaines plages horaires sont réservées aux films tous publics. Par exemple, les films interdits aux moins de 12 ans ne sont pas diffusés avant 22 heures sur les grandes chaînes. Les longs-métrages qui sont réservés aux plus de 18 ans sont visibles sur les chaînes cryptées uniquement, entre minuit et 5 heures du matin. Cela limite le prix de vente potentiel du film aux chaînes de télévision.
Ces catégories d’âge peuvent être contestés par les spectateurs ou des associations (exemple : « Antéchrist » a failli passé de « - de 16 ans » à « - de 18 ans » ou « X »).
« A quoi bon restreindre l'accès aux films quand toutes les images sont aujourd'hui en libre accès ? ». C’est la question que l’on se pose de nos jours.
Entre 2010 et 2012, les interdictions de moins de 12 ans à moins de 16 ans avec avertissement ont diminué par rapport aux années précédentes. Est-ce lié à une « accoutumance de la violence » ou à un souci économique ?
Même les films français ont tendance à « s’autocensurer », pour pouvoir mieux se vendre à la télévision. Et le phénomène se repend dans le monde.
L’avis d’un internaute : « Je ne comprends pas que ce film soit autorisé à partir de 12 ans. Personnellement je n'ai rien contre le SM, et j'y suis même plutôt sensible, mais "proposer" ce genre des sexualités à des adolescents à un âge où l'on se construit à ce niveau, où l'on expérimente ses premiers flirts, ne me semble pas du tout opportun. Ils auront bien le temps de découvrir leurs propres envies et leur propre chemin avec les années. Une interdiction moins de 16 ans aurait été beaucoup plus logique me semble t-il. »